Le blouson*
En CM2, un garçon violent de ma classe venait de franchir le rubiconen giflant une fille à la récré. Étant juste à
côté au moment de faits, un groupe de filles outrées exigea que je me confronte au malotru. Alors que je tentais d'apprendre a ce rustre qu'on ne frappe pas les filles, celui-ci me colla direct
un bourre-pif.
Mes aïeux !
Moi qui ne m'étais encore jamais battu, je me retrouvais le nez et la bouche en sang! Évidemment ce n'était pas la
résolution attendue par la bande de filles qui exigeait un sang autre que le mien. J'attrapais donc le forcené, le collais au sol et lui assénais une bonne baffe en retour. Pas la plus grosse des
baffes, mais pas non plus une baffe de mauviette.
Ah ! Quel embarras...!
Le forcené se releva en larmes et cracha dans sa paume, une dent ?!
Je venais de lui faire sauter une dent ?!
Il menaçait désormais de se plaindre auprès de l'institutrice, preuve à l'appui ! "Une baffe à une fille" contre "une dent en moins"?
Les pronostics étaient contre moi et je décidais de m'éclipser discrètement. Mais les filles n'étaient pas de cette avis. Selon elles, j'étais le témoin principal... et la clique entreprit de me pourchasser dans la cour de recrée pour me traîner de force devant l'instit.
Comment en étais-je arrivé là? Poursuivi par des filles enragées?! La meute me tomba dessus toutes griffes dehors et je dû me défaire de mon blouson pour lui échapper. Blouson qu'elles refusèrent de me rendre, évidemment.
2 jours plus tard, suite à un désaccord au foot, un certain Rappoport fit sauter sa 2ème dent de la semaine à l'enragé! Il était apparemment en pleine période des dents de lait. Immédiatement, nous formâmes la coalition de "Ceux qui lui en ferait sauter une 3e s'il continuait à faire du grabuge !" Ce qui eut son effet.
Le lendemain, ma mère s'étonna de la disparition de mon blouson.
Pouvais-je lui dire qu'il m'avait été arraché par une meute de filles? Hum, pas très
glorieux......
"-Il m'a été volé par 2 voyous dans la rue !" me sembla la réponse la plus simple.
Tout ce compliqua l'après-midi lorsqu'elle m'entraîna au commissariat pour porter plainte. J'aurais peut-être dû me confronter à l'institutrice car cette histoire ne cessait de rebondir de manière totalement incontrôlable.
Au commissariat, je me lançais dans une description détaillée de mes deux agresseurs
imaginaires.
1/2h plus tard un policier tenta de me faire changer ma déposition, ruse de flic pour vérifier la solidité de mon témoignage. l'enfant que j'étais le soupçonna plutôt d'avoir des clients sous la main et de vouloir faire correspondre ma description à leur signalement. Heureusement, pour les inventer, je les avais mentalement visualisé et je corrigeais aisément mon contradicteur.
Après avoir signé quelques papiers et répondu à des questions sensées déterminer à quel point j'étais traumatisé
par mon agression imaginaire, je sortais le cœur léger du commissariat sans vraiment comprendre le regard inquiet de ma mère soudainement très sensibilisée au problème des violences faites aux
enfants.
Être en CM2 et enregistrer son premier faux-témoignage chez les flics, assurément un bon souvenir !
La suite fut moins drôle, lorsque ma mère reçue un coup de fil de la directrice. Un blouson à mon nom avait été trouvé dans la cour de récrée ! Enfer ! J'avais été trahi pas ces cochonneries d'étiquettes de colonie de vacances ! Ma mère menaça un temps de me ramener illico au commissariat.
Un jour il faudra que je lui raconte cette histoire...
*Loïck
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